La vallée de la Haute Durance

Le socle support

Sols alluvionnaires en fond de vallée, calcaires et dolomies triasiques pour ses versants entre massif cristallin en rive droite et arc queyrassin en rive gauche.

La vallée de la Haute Durance est le résultat d'un gigantesque façonnement glaciaire formant ses éléments de relief si spécifiques : Vallées suspendues (Freissinières) / Replats témoins d'auges anciennes (en amont de Briançon, entre Prelles et l'Argentière, à Saint Martin de Queyrières, Villa Meyer, Saint Hippolyte ou encore Saint Crépin) / Vallées en auge plus ou moins larges présentant des épaulements glaciaires (Mont Prorel et les Puys, le mot Puy signifiant ici hauteur, sommet)

La vallée s'élargit progressivement jusqu'à la confluence avec le Guil. La Durance s'installe alors dans un large bassin délimité au Sud par l'ubac du Pic de Chabrières ramenant son cours vers le verrou de Saint Clément. Tandis que sa rive gauche s'ouvre vers la vallée du Guil et les pentes douces du piedmont de Risoul, sa rive droite se heurte aux épaulements glaciaires des versants cristallins du Pelvoux.

C'est la variété de la série des Flyschs en rive gauche qui forme des pentes doucement vallonnées ou des silhouettes ruiniformes. L'action périglaciaire torrentielle est aussi à l'origine de formes de relief spécifiques, comme le glacis d'Eygliers.

Le réseau hydrographique

Le bassin versant de la Durance et ses principaux affluents Clarée, Guisane, Cerveyrette, Gyronde, Biaysse et Guil.

De régime torrentiel, nival dans la Haute Durance, le débit capricieux de la Durance est à l'origine de nombreux aménagements qui furent utiles pour dompter ses emportements, souvent dévastateurs, et pour réguler son débit. Les traditions populaires provençales faisaient d'elle le troisième fléau de la Provence après le mistral et le Parlement d'Aix.

Eau nourricière, elle a dessiné une voie de communication majeure. Dès l'époque romaine, la vallée de la Durance relie la plaine du Pô à la Provence. Difficilement franchissable, elle était néanmoins navigable.

Contrairement à ses vallées affluentes, que ce sont la Guisane, la Clarée ou la Cerveyrette, elle ne se termine pas en cul de sac. Il semblerait que ce soit pour cette raison que cet hydronyme a prévalu sur celui de la Clarée ou de la Guisane.

La végétation

Riche biodiversité : entre étages alpin, subalpin et montagnard.

D'abord rivière alpine, La Durance traverse les prairies d'altitude qui couvrent les pentes du sommet des Anges. Très vite, elle parcourt les bois de mélèzes. Jusqu'à Embrun, ses rives se couvrent de mélèzes et de pins sylvestres sur les adrets tandis que le hêtre et le sapin s'implantent sur les ubacs. Les piedmonts de ses reliefs se parent de robiniers (faux acacias), de sorbiers, d'érables, de frênes, de trembles et de peupliers. A partir de Briançon, le noyer, préférant les sols pierreux, profonds et perméables s'associe à ces espèces dans les fonds de vallée à l'abri des vents froids. C'est à partir de Saint Clément que commence à apparaître les espèces associées à l'étage collinéen comme le chêne pubescent et même la lavande.

L'urbanité

Dès l'époque romaine, la vallée de la Durance a installé des voies de communications reliant la Provence à la plaine du Pô, ouvrant la porte aux influences piémontaises dont le patrimoine architectural porte les traces. Cet axe de communication a placé Briançon en position de ville frontalière à l'origine des nombreux forts. Briançon, plus haute ville d’Europe et station climatique, bénéficie d'un ensoleillement exceptionnel. Ailleurs dans la vallée, à la faveur d'évasements, l'homme s'implante en fond de vallée :

• Briançon d'abord.
• L'Argentière la Bessée, où la qualité du sous-sol a permis le développement d'une industrie minière, l'argent au XIIème siècle, puis au XIXème siècle, l'hydroélectricité et la production d'aluminium prennent le pas sur l'industrie extractive.

Aujourd'hui, cette activité industrielle disparue, la ville a su se reconvertir pour devenir une destination à caractère touristique en développant de nouvelles activités et en valorisant son passé industriel. L'urbanisation se développe ensuite le long de l'axe de communication principal de la RN 94 le plus souvent à flanc de versant : en pied de versants ou sur des replats glaciaires, protégés des crues de la Durance et bénéficiant d'un meilleur ensoleillement.

Les formes urbaines

Villages et hameaux de montagne

le mode d'organisation de l'habitat dit vernaculaire est groupé. Il correspond de manière générale à la zone intra-alpine, aux hautes vallées soumises à de fortes contraintes économiques et naturelles. Il s'agit avant tout de préserver les terres fertiles tout en évitant les risques naturels (avalanches et inondations). Ce principe a conduit les hommes à se grouper en villages et hameaux très ramassés, ajustant l'orientation des maisons, adret et ubac, pour bénéficier du meilleur ensoleillement. Le mode d’organisation de l’habitat est groupé avec un centre regroupant les services publics, l’église et la mairie, et une multitude de hameaux dispersés sur l’ensemble du territoire communal. Ces hameaux avaient pour vocation première l’exploitation saisonnière du finage agricole de chaque famille (fourrage et exploitation laitière) ; l’emplacement de ces hameaux s’est imposé par la présence de l’eau et dans l’idée de préserver les terres exploitables, tout en les abritant des risques naturels.

Les caractères architecturaux

L’architecture religieuse est  évocatrice

clochers dauphinois jusqu’à l’Argentière puis influence lombarde en amont avec des clochers en bois ou en pierres. A noter la présence de monuments religieux d’altitude non négligeable tels que Notre Dame des Neige à Puy Saint-André et Saint-Hyppolite à Saint-Martin de Queyrières. La présence protestante est surtout marquée sur la vallée de Freissinières,mais irrigue toute la vallée vu les relations avec le Queyras voisin.

Infrastructures & Réseaux

Depuis toujours, la vallée est un axe de communication important.

Dès l'époque romaine, la voie Domitienne l'emprunte reliant l'Espagne à l'Italie, en passant par le col de Montgenèvre.

Aujourd'hui, la vallée de la Haute Durance est centrée sur la RN 94, principale voie de desserte du département qui relie les deux plus importants pôles urbains, Gap et Briançon. Elle assure la liaison avec l'Italie par le col du Montgenèvre. Cet axe principal de circulation a été initialement conçu pour traverser les villages ; dans bien des cas, ce sont les villages qui se sont « déplacés » autour de la voie de circulation pour des raisons purement commerciales (Saint-Clément, Eygliers, etc.). La stratégie actuelle et ce, depuis plusieurs années, consiste à créer des infrastructures de contournement des villages pour réduire les temps de déplacements entre Gap et Briançon et entre la sortie de l’autoroute A51 à La Saulce et Briançon. Châteauroux-les-Alpes a fait l’objet de cette « déviation » la première (1993-94), suivi par Saint-Martin de Queyrières (1995-96) et enfin Chamandrin et Saint-Blaise au Sud de Briançon (1998-2000). Des demandes s’affichent dans le village de la Roche-de-Rame pour son contournement, mais le projet n’est pas engagé.

Les paysages de loisirs

La vocation touristique d’une vallée-couloir de circulation se résume le plus souvent au transport des vacanciers d’un lieu à un autre !

Cependant, l’Unité recèle de multiples spots sportifs qui recouvrent les activités suivantes :

• L’escalade : sites de Saint-Crépin, Montdauphin, Champcella (Le Ponteil, le Pouit…), Pra-Reboul pour les principaux
• La via ferrata sur la commune des Vigneaux
• Le canoë-kayak avec deux grands espaces aménagés à l’Argentière-la-Bessée et à Saint-Clément
• Le rafting avec un point de départ aménagé à Saint-Clément
• ULM, vol à voile et avion à moteur sur l’aérodrome de Saint-Crépin

Les paysages agricoles

Partout, l'homme a dû adapter ses modes culturaux au socle support. Ici alterne l'agriculture des pentes et celle de fond de vallée. Elevage ovins et bovins dans les alpages, prairies de fauche dans les dilatations des cours d’eau, céréales et vignes accrochées aux pentes des reliefs.

En amont de la vallée, l'espace agricole se restreint au fond de vallée entre Briançon et l'Argentière sur des terres rendues fertiles par des alluvions, sans haie pour exposer au maximum les terres au soleil. Les cônes de déjection, une fois maîtrisés, deviennent cultivables. C'est une production essentiellement fourragère car ici l'élevage domine grâce à des alpages qui offrent des espaces de pâtures de qualité.

Les paysages industriels

L’histoire industrielle de L’Argentière débute à la fin du XVIIIe siècle, avec l’extraction du plomb argentifère. La production d’aluminium et de quartz fondu prendra le relais. Pendant “l’âge d’or” de 1950 à 1970, Péchiney fera travailler, directement ou non, environ 1 500 personnes

L’activité industrielle de Péchiney a cessé dans les années 90. La ville a perdu sa vocation industrielle et tente une reconversion sur les services et le tourisme. Celle de La Roche de Rame est maintenue avec une production de matière plastique (EXTRUFLEX).

L'abandon de l'activité industrielle est à l'origine de profondes mutations avec l'apparition de friches industrielles et par un abandon des formes urbaines traditionnelles au profit d'un habitat individuel, qui "saupoudre" les pentes de lotissements.

Les paysages administratifs

Le territoire recouvre une vingtaine de communes soit intégralement, soit partiellement.

Cependant, la population de ce territoire se concentre pour plus de la moitié sur la ville de Briançon et ses villages périphériques : Villar Saint Pancrace, Saint- Martin-de-Queyrières ; les villes de l’Argentière-la-Bessée et de Châteauroux-les- Alpes rassemblent le reste de la population pour l'essentiel. Ce sont donc les politiques de ces pôles urbains qui détermineront la politique paysagère de l’UP.

Le fond de vallée

Le fond de l'auge glaciaire est exploité par l’homme sous toutes ces formes : agricole, touristique (campings, plan d’eau, canoé-Kayak…), industrielle (électricité, Le Planet, ex-Péchiney) et les réseaux (routiers, ferré, électrique…).

C'est dans ce fond de vallée que s'exprime toute la richesse de cette rivière :

• Richesse paysagère par la valeur de ses espaces associés : variété écologique des milieux terrestres et aqua¬tiques, faunistique et floristique.
• Richesse économique dans l'exploitation de l'énergie hydraulique et par ce qu'elle offre d'activités de loisirs et sportives.

C'est aussi dans ce fond que s'installent les grandes infrastructures de déplacement, routières et ferrées, qui lui confère ce rôle d'axe majeur de liaison, rapprochant ainsi la Provence et les Alpes via Grenoble, mais aussi la Provence et l'Italie via le col de Montgenèvre.

L'histoire se raconte encore :

• Histoire industrielle : dans ce qu'elle laisse comme architectures représentatives et dans ce qu'elle a construit comme histoire d'hommes et histoires d'homme.
• Histoire militaire : au travers des édifices classés Patrimoine Mondial de l'Unesco.

Les versants

Parce qu'ici la géologie est singulière, l'érosion glaciaire a façonné une vallée aux reliefs uniques entre plateaux glaciaires, verrous et ombilics. Elle soumet d'ailleurs la vallée à un risque assez élevé de chutes de blocs. Ils sont occupés ou non selon la nature du sol.

Elle est aussi à l'origine de sentiers de découverte sur ce thème. Globalement se distinguent deux types de versants :

• Les versants habités : ils se trouvent principalement aux extrémités de l’UP c’est-à-dire de Châteauroux à Réottier, puis à l’entrée du Fournel et enfin sur le versant de Puy Saint-André et Puy Saint-Pierre
• Les versants abrupts : entre ces espaces occupés, les versants se font abrupts et consti-tuent la majeure partie de l’Unité de Paysage. Entre affleurements rocheux et éboulis ils caractérisent ces vallées glaciaires en U et contraignent fortement l'implantation humaine. Ils donnent à la vallée son aspect de couloir, surmontée de ses hauts sommets.

Le haut des vallées

Le haut des vallées : au-dessus de l’auge glaciaire se déploient de multiples espaces agricoles, agropastoraux, sylvo-pastoraux, purement pastoraux ou purement forestiers. Des hameaux se répartissent ces espaces sur le versant Est (hameaux de Saint-Crépin, de La Roche de Rame, de Saint-Martin) alors que des communes occupent les versants Ouest (Réotier, Champcella, Freissinières, Les Vigneaux, les « Puy »…)
Ces hauteurs installent la qualité paysagère des horizons qui construisent le cadre de vie privilégié de cette vallée urbaine car ils offrent le vis à vis de la haute montagne.
Ce sont aussi des lieux de pratiques sportives entre escalade et alpinisme

La « source » de la Durance

Puis il y a la source de la Durance qui débouche des hauteurs de Montgenèvre et qui s’avère être un secteur singulier en raison de la présence de la plus vieille station des Hautes-Alpes tout en étant l’une des plus dynamiques en terme d’impact sur les paysages. Témoins de ce dynamisme, les nouvelles activités balneo-ludiques et les projets d'extension de la station.

Cette urbanité s'installe dans un environnement de nature composé d'habitats déterminants associés aux milieux humides et aux éboulis calcaires.

La Durance émerge dans de grandes surfaces herbeuses encore pâturées reconnues pour leur grande diversité d'habitats. Ces surfaces de prairie sont parsemées de lacs d'altitude et de bas-marais qui occupent les talwegs.